Des opportunités sur les foncières décotées (entretien avec L. Gauville)

Entretien extrait de l’article :
Une décote toujours importante sur les fonds d’immobilier coté
par Thierry Bisaga

Quel regard portez-vous sur le secteur de l’immobilier coté ?
Boursièrement, le secteur est perturbé depuis plusieurs semestres. Il est très en retard en termes de valorisations. Il s’agit pourtant d’un secteur qui offre de la stabilité avec une croissance moyenne des cash flows de 3 à 4 % sur le long terme. Ces niveaux de croissance sont d’ailleurs observés avec une très grande régularité tant sur les cash flows que sur les valeurs d’actifs. Entre janvier 2020 et décembre 2023, si on a pu constater une performance économique de l’ordre de 30 % pour le secteur, la performance boursière est quant à elle voisine de -35 %. De notre point de vue, un tel écart constitue une forte opportunité d’investissement.

Selon vous, quels sont les facteurs qui ont conduit à cette contre-performance ?
A la suite de la pandémie, les pessimistes l’ont emporté sur les optimistes. Le marché a anticipé une forte baisse des cash-flows et des valeurs d’actifs. En 2022, le marché anticipait une baisse des valeurs d’actifs de 30 % or elles n’ont baissé que de 5 % en réalité. Mécaniquement, on observait, en fin d’année, des niveaux de valorisation historiquement bas, similaires à ceux observés en mars 2009, le précédent point bas du secteur. Plus précisément, les multiples de cash flows des valeurs du portefeuille de notre FCP Immobilier 21 s’établissaient à 9,9 fois. Cela implique une décote voisine de 50 % qui, si elle se maintient, impliquera un rendement attendu de 10 % environ pour les foncières que nous détenons. Notez qu’une telle décote n’a été observée que trois fois en un quart de siècle !

Pensez-vous que cette décote va rapidement se résorber ?
Nous estimons que, sur un horizon de 5 ans, les perturbations observées vont nécessairement s’estomper. On retrouvera alors une convergence entre les performances boursières et les performances économiques du secteur. Nous nous attendons notamment à un retour progressif des multiples de cash flows aux alentours de 15 avec la décote sur les valeurs d’actifs qui devrait, quant à elle, diminuer de moitié, ce qui implique une hausse de 50 % sur la valeur liquidative de notre FCP. Concomitamment, les niveaux de volatilité devraient retrouver leur moyenne historique avec un retour à davantage de sérénité.

Quels sont les catalyseurs qui favoriseront ce retour à la normale ?
Parmi les catalyseurs d’une hausse à venir de l’immobilier coté, on peut mentionner l’arrêt de la hausse des taux d’intérêt mais aussi la capacité des valeurs foncières à indexer les loyers perçus au niveau d’inflation, ce qui a été démontré à l’occasion des dernières publications. On compte également sur le retour des transactions immobilières, combiné à une stabilisation de l’endettement des foncières, ce qui impliquera une re-normalisation de la distribution des dividendes. Tout cela se mettra en place progressivement et permettra un retour des flux positifs sur les foncières cotées. Pour l’heure, on observe que la collecte reste stable.

Quelles sont vos principales convictions parmi les différents segments du secteur ?
Les deux tiers de notre portefeuille sont investis sur des actifs de commerce et sur le résidentiel allemand. Ces deux segments permettent de stabiliser le portefeuille. Sur les autres typologies d’actifs, nous procédons à des choix sélectifs, par exemples sur les bureaux – en nous tenant néanmoins à l’écart des bureaux périphériques – sur les actifs de santé ou encore la logistique.

Quel regard portez-vous sur les approches ESG appliquées à l’immobilier ?
Ces approches et plus spécifiquement les certifications environnementales des bâtiments sont créatrices de valeur. Les actifs certifiés sont sécurisants en ce sens que le risque de vacance est réduit, qu’ils attirent les investisseurs, qu’ils permettent la perception de loyers plus élevés mais aussi un accès plus facile au financement. On peut d’ailleurs observer que les foncière cotées sont très en avance sur la certification environnementale de leur patrimoine.